S’allier autour de la naissance

credit photo Isabelle Challut

J’ai mis au monde des enfants, je suis devenue infirmière en obstétrique pour comprendre le milieu médical et ses orientations puis je suis devenue doula par conviction. Car, au-delà de toutes mes connaissances techniques et médicales et de mes capacités à intervenir, le plus important selon moi, pour faciliter l’expérience des femmes était l’ACCOMPAGNEMENT que j’expérimentais.

Accompagnement qui offre un espace dans lequel la femme se sent en sécurité pour avancer. SÉCURITÉ intérieure et CONFIANCE sont les piliers d’un environnement facilitant la mise au monde. 

Bien sûr, des professionnel.les qualifié.es et capables d’intervenir vite en cas de problèmes sont nécessaires. Mais ils ne devraient pas intervenir en première ligne. 

Je réfléchis ici au REGARD porté sur la naissance : au fil des années, la médicalisation a pris le dessus et de moins en moins de citoyen.nes et de professionnel.les voient la mise au monde comme une expérience personnelle, physiologique et globale.

Le corps est considéré d’emblée défaillant. 

La confiance en la capacité des femmes à traverser les processus est effritée.

Dans ce paradigme, on a développé une totale confiance au milieu obstétrical et le vécu des femmes est souvent ignoré et minimisé.

Accoucher par soi-même devient anecdotique…voire dangereux. 

Pourtant de nombreuses femmes aimeraient mettre au monde sans intervention car elles ont cette intuition qu’elles peuvent le faire et qu’éviter une médicalisation non nécessaire est mieux pour leur santé et celle de leur bébé.

 Mais peu de personnes en sont convaincues et les compétences dans cet accompagnement sont en voie de disparition. Certains professionnel.les n’ont JAMAIS vu une femme enfanter sans aide extérieure. 

Les maisons de naissance existent au Québec depuis 25 ans et combien de médecins et infirmières ont été curieux d’aller voir comment un accouchement peut se dérouler hors centre hospitalier avec des sages-femmes? C’est également anecdotique.

La grande question est la suivante : qui est au centre des processus de la mise au monde? La femme ou l’équipe médicale?

«Dans les soins, la notion d’une activité partagée, une co-activité donnant lieu à une co-production ou une co-construction des soins, s’est affirmée peu à peu avec la critique de la médicalisation, de la relation inégalitaire et paternaliste qu’elle a suscitée ainsi que de l’évacuation du sujet par le modèle biomédical[1]

Cette réflexion est à la source d’un stage proposé en France les 22 et 23 mai 2025 avec Floriane Stauffer, sage-femme. Nous proposons 2 journées d’exploration et de partage autour de ce thème : LES RACINES DE LA CONFIANCE- S’ALLIER AUTOUR DE LA NAISSANCE pour les personnes impliquées autour d’une famille en devenir. Les professionnel.les médicaux, les partenaires, les différents intervenants en périnatalité et les doulas peuvent-ils se redonner une place et collaborer dans un but commun: offrir un espace sécurisant et axé sur la confiance aux parents? Chacun a une place très spécifique et peut-on apprendre à mieux se connaitre et à collaborer au service de la mise au monde? 

Cette réflexion est également toujours en cours dans les formations et activités proposées aux doulas afin de développer une pratique connectée à la réalité et aux enjeux actuels. Trouver les mots pour nourrir la confiance et l’autonomie des parents est un réel défi et nécessite une réflexion. Être une doula engagée, dans le système actuel, nécessite une réflexion sur sa posture et une clarification de sa place et de ses rôles.


[1] Quand déclencher l’accouchement, c’est confisquer la maternité aux femmes,Claudine Schalck et Raymonde Gagnon, L’Harmattan, 2022, p.27